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Quels samples a-t-on (vraiment) le droit d'utiliser ? Un avocat spécialisé nous explique

 

Que seraient le hip-hop et la house sans les samples ? Pas grand-chose. De la batterie de “Funky Drummer” de James Brown, devenue l’une des bases du rap américain dès les années 1980, aux boucles disponibles sur les logiciels de montage désormais utilisées à l’infini, les échantillons sont l’une des matières premières des musiques actuelles. Et pourtant : leurs conditions d’utilisation font toujours débat.
Une bonne fois pour toutes : dans quelles conditions peut-on utiliser un échantillon d’un morceau pré existant pour créer une œuvre nouvelle ? On fait le point avec Grimaud Valat, avocat lyonnais spécialisé dans la propriété intellectuelle. 

 

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© Ruslan Grumble

Par Trax Magazine
En partenariat avec la Electronic Music Factory

 

Le sample n’est illégal que si l’œuvre est reconnaissable. 

« En principe, pour utiliser un sample, il faut en demander l’autorisation aux ayants droit. S’il l’on ne respecte pas leurs conditions, la reproduction est rigoureusement interdite. », explique Grimaud Valat. « Pour autant, la reproduction partielle d’une œuvre n’est répréhensible que si l’œuvre d’origine est identifiable et reconnaissable. » C’est d’ailleurs ce qu’a rappelé la Cour de Justice de l’Union Européenne dans son nouvel arrêt, cet été, dans le cadre de l’affaire Kraftwerk. Le groupe allemand poursuit la rappeuse Sabrina Setlur pour avoir utilisé un sample du morceau “Metall auf Metall”. La CJUE, elle, a jugé cette reproduction légale, puisque l’extrait sonore a été modifié au point de ne plus être reconnaissable. On notera également qu’il est a priori légal d’utiliser un « son isolé », comme une note, un kick très court, qui ne sont de facto presque jamais reconnaissables.

 

Le cas à part des œuvres tombées dans le domaine public.

C’est l’une des exceptions qui rend le « sampling » légal : « Les œuvres tombées dans le domaine public (dont l’auteur est mort depuis plus de 70 ans), sont reproductibles sous réserve du droit moral de leur auteur qui, lui, ne s’éteint jamais. Il faut par exemple toujours veiller au respect de l’œuvre, et au droit à l’auteur d’être cité en cette qualité ». Oui, vous pouvez désormais sampler les plus beaux morceaux de l’année 1949. Bonne nouvelle pour les producteurs fans d’Edith Piaf ou de Frank Sinatra. Pour autant, n’oublions pas que si l’œuvre est tombée dans le domaine public, son interprétation fait elle l’objet d’une protection à part entière. Ainsi, si vous voulez sampler un extrait d’un air de Puccini chanté par la Callas, il vous faudra vous renseigner auprès des ayants droit de l’enregistrement. 

 

Et à l’international ?

Au niveau européen, comme le précise Grimaud Valat, « la législation protégeant le droit d’auteur est relativement unifiée par l’application de la convention de Berne sur la protection des œuvres littéraires et artistiques. » Et à l’international ? « La Convention de Genève de 1971 organise la protection des producteurs de phonogrammes (c’est-à-dire de la fixation des œuvres sur disque, ou sur un fichier numérique). Elle a été adoptée par 80 pays : on peut donc dire qu’il y a une forme d’unification des droits des phonogrammes à l’international. »

 

Vous êtes producteur ? Retrouvez toutes les informations délivrées par la Sacem ici.

 

C. Laborie

 

10 décembre 2019