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En tant qu'artiste, peut-on vivre du streaming musical ?

 

La pratique de l’écoute en streaming poursuit sa progression dans le monde, mais les retombées pour les artistes restent très faibles. A l’heure où les musiciens sont privés de concerts, les initiatives pour rentabiliser l’écoute en ligne se multiplient.

 

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Boiler Room de Peggy Gou  © Capture d'écran YouTube

 

Par Trax Magazine
En partenariat avec la Electronic Music Factory

 

Privé de concerts et de clubs, le public du monde entier a trouvé son réconfort auprès des applications de streaming. En témoigne le chiffre d'affaires record de Spotify au second trimestre de 2020 : 1, 89 milliards d'euros, soit une hausse de 13% par rapport au second trimestre de 2019. A la fin du mois de juin dernier, la firme née en Suède comptait 138 millions d'abonnés Premium dans le monde. C’est 27% de plus que l’année dernière. 

Pour autant, ceux qui produisent la matière première des applications de streaming musical, les artistes, ont-ils profité de ces succès sans précédent ? Avec l'abonnement Premium, Spotify reverse 0, 0071 € par écoute à l'artiste ou au label par écoute. Un chiffre qui s'abaisse à 0, 0024 € par écoute si l'auditeur ne paye pas d'abonnement. Le compte Instagram britannique @somewere_soul s'est amusé à mettre ces chiffres en perspective : il faudrait 807 streams pour se payer un café, et 384 515 streams pour financer une session de 20 heures en studio.

Seule une poignée d’artistes internationaux tire des rémunérations conséquentes des streams, même s'ils sont devenus l'un des moyens de consommation de musique les plus courants, derrière la radio en France. L'enjeu a pris de l'importance depuis le début de la pandémie de Covid-19 et les interdictions successives de rassemblements populaires. Pour garder le lien avec leur public, des milliers d'artistes à travers le monde ont opté pour les « livestreams », ces concerts numériques diffusés en direct sur les réseaux sociaux – la plupart du temps à titre gracieux.

Certains diffuseurs ont profité de leur visibilité pour lancer des appels aux dons en faveur de la filière musicale en péril. C'est le cas de l'opération internationale United We Stream, qui a permis de récolter 1600 € pour les clubs et artistes français précarisés via la plateforme HelloAsso.

 

Des partenariats nouveaux pour rémunérer les livestreams

 

Dès le mois de mai, la Sacem annonçait la mise en place d'une rémunération spécifique, réservée à ses membres dont les « livestreams », diffusés sur Instagram, Facebook et Youtube, ont fait au moins 1000 vues. Les auteurs, compositeurs, éditeurs peuvent depuis le 3 juin déclarer leur live depuis un espace membre. Un livestream d'une durée supérieure à 20 minutes est rémunéré 76 €, avec un supplément de 0, 001 € par vue.

En avril dernier, la plateforme de vente de billets de soirées electro Shotgun a fait preuve d'inventivité en créant Disdancing, sorte de « Netflix des livestreams » qui répertorie toutes les vidéos par genre musical. Au lieu de choisir entre comédie romantique et film d'aventure, on y pioche, selon son humeur, entre « Play it chill », « Play it groovy » et « Play it hard ». Certains « livestreams » sont payants, et les billets mis en vente via Disdancing permettent de fournir une rémunération aux artistes et aux équipes organisatrices.

Encore tâtonnante, la rémunération des streams devrait rester au cœur des débats dans les mois et les années à venir. Avec le secteur des jeux vidéos, celui du streaming est le seul à avoir généré plus de chiffres d'affaires cette année qu'en 2019. Des bénéfices qui, pour l'heure, ne se sont pas retrouvés dans la poche des artistes, auteurs et producteurs.

 

C. Laborie

 

7 août 2020