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L’intelligence artificielle va-t-elle remplacer les musicien.n.e.s ?

 

L’avenir musical est aussi excitant que terrifiant : des morceaux sont composés aujourd’hui entièrement par une intelligence artificielle. Au point de remplacer les musicien.n.e.s ? Pas si sûr. 

 

 

IA

 

Par Trax Magazine
En partenariat avec la Electronic Music Factory

 

« La création de l'intelligence artificielle serait le plus grand événement de l'histoire de l'humanité. Mais il pourrait aussi être l’ultime », disait le célèbre astrophysicien Stephen Hawking. Au point de desservir l’art et la création musicale ? Pas si sûr, répondrait Actress, interviewé en novembre 2018 par Trax. Son EP, Young Paint a été co-composé à l’aide d’une IA : « Plus je pratiquais et sortais des disques, plus je réalisais que l’informatique et la musique étaient connectées, qu’ils formaient un tout », disait-il au magazine. 
Que peut faire l’IA pour la création musicale ? Créer de véritables morceaux, d’abord. Et c’est bluffant : en 2016, le laboratoire Sony CSL sortait Daddy’s car, une pop-song entièrement créée par une intelligence artificielle. À l’époque, The Verge qualifie ce procédé de « terrible avertissement ». Depuis, nombreuses sont les entreprises à travailler autour de l’intelligence artificielle pour produire – ou aider à la production – de la musique. Un album entier, publié chez Warner Music a même été composé par une IA, Sleep:Foogy Morning, avec son vrai nom d’artiste, Endel, du même nom que sa start-up créatrice. Favoriser la concentration, détendre, aider à dormir… L’entreprise préfère alors parler d’Endel comme d'un « éco-système audio » plutôt que de musique, à proprement parler. 

 

La musique, des mathématiques ? 

 

Mais de quoi parle-t-on, exactement ? Car l’IA est peut-être présente depuis des décennies dans nos compositions musicales. Celle-ci est généralement définie comme telle : un ensemble de théories et de techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l’intelligence humaine. Des mathématiques aux algorithmes, donc. Or, pointerait le philosophe antique Platon, la musique n’est-elle pas avant tout affaire de mathématiques ? Dans son essai Musique & Mathématiques, Bernard Parzys rappelle que « l'oreille est sensible, non aux différences, mais aux rapports de fréquences des sons », soit les intervalles entre chaque note, chaque son. Pourrait-on dire alors que la musique n’est rien d’autre qu'un amas de données mathématiques et sensibles ? La question mérite aussi d’être posée en ce qui concerne la musique assistée par ordinateur (MAO). Ableton Live, Logic Pro… Ces logiciels qui aident à la création musicale fonctionnent sous forme de « boucles » et de sons créés par un ordinateur. 

 

L’IA comme aide à la création 

 

Actress, lui, ne s’est jamais dit que l’IA ferait de la musique à sa place. Il la fait avec. En définissant un pattern de couleurs et de sons, il « nourrit » son IA, « comme si je l’entrainais », raconte-t-il. La chanteuse américaine Taryn Southern a aussi « collaboré » avec une intelligence artificielle. À l’aide du programme Amper (application où l’on peut choisir une ambiance, un ton, un genre musical pour créer), elle a composé son album I Am AI

 

 

« C’est encore moi la patronne », disait-elle cependant à France Info. Ajoutant : « L’IA m’a forcée à sortir de ma base créative avec des résultats inattendus. » Stromae himself a lui aussi composé un titre avec une intelligence artificielle, pour l’album Hello World. Celui-ci regroupe une dizaine de morceaux, tous co-composés par l’intelligence artificielle Flow Machines et le musicien Benoît Carré dans le laboratoire Sony CSL. Ainsi, Flow Machine, qui sait composer « dans le style de », est davantage un « superpartenaire » de jam, « une encyclopédie (presque) vivante capable de générer des motifs auxquels on n’aurait pas pensé tout seul », disait Carré à Trax en février 2018. De même, la chanson pop Daddy’s Car avait d’abord été commanditée par des humains, qui y ont intégré un certain nombre de codes, données.

 

 

Certes, comme le rappelait le magazine la Fabrique culturelle lors de la présentation du projet, avant d’être un objet artistique, Flow Machines fut un projet scientifique, financé par la Commission européenne et réalisé en collaboration avec l’Université Pierre-et-Marie-Curie (Paris 6). Plutôt que de considérer l’intelligence artificielle comme une musicienne, celle-ci serait plus une aide à la création. Et si tout cela vous semble encore bien loin, l’application Amper peut-être un bon moteur pour mêler l’expérience de l’IA à vos productions.

 

Angèle Chatelier