Sexisme, âgisme, discriminations : encore trop d'obstacles pour les femmes dans l'industrie musicale
Comment les musiciennes, productrices, DJs font-elles face aux discriminations qui les freinent dans tous les aspects de leurs carrières ? Quelles sont leurs priorités dans leurs aspirations à l'égalité ? Comment, enfin, leur permettre d'être prises aux sérieux et de faire valoir leurs créations au même titre que les hommes ? Ces questions cruciales sont au centre d'une étude d'opinion publiée par la société d'analyse britannique MIDIA Research.
2 avril 2021
La DJ Calling Marian © Thomas Bader
Par Trax Magazine
En partenariat avec la Electronic Music Factory
Mieux comprendre les défis auxquels font face les femmes dans l'industrie musicale contemporaine : c'est tout l'objectif de la nouvelle étude réalisée en février par la société d'analyse des médias MIDIA Research et l'entreprise de distribution et d'édition de musique TuneCore. L'enquête compile les témoignages de 401 artistes, autrices-compositrices, productrices et DJs venues des États-Unis, de Grande-Bretagne, du Canada, du Mexique, de Russie, de Nouvelle-Zélande, de Turquie et des Philippines. Elle s'interroge sur les objectifs, expériences et aspirations des musiciennes pour mieux comprendre les obstacles auxquels elles doivent faire face, de la discrimination directe aux dégâts plus diffus causés par le manque de représentation. Car selon les auteurs de l'étude, si « une carrière dans la musique n'est jamais une option facile », « quand on parle des artistes femmes, les défis habituels d'une navigation dans un milieu complexe et imprédictible sont démultipliés ». D'après les données de l'étude, toutes les professionnelles interrogées ont déjà fait face au moins une fois à une forme de discrimination ou d'exclusion.
Agisme, objectification et manque de reconnaissance
Et alors que le sujet des violences sexuelles et des inégalités de genre semble progressivement prendre de l'ampleur dans le milieu de la musique, le chemin à parcourir est encore long. Car selon les enquêteurs, parmi les 401 créatrices interrogées dans le monde, 81 % pensent qu'il est plus difficile pour les artistes femmes d'obtenir de la reconnaissance que pour leurs homologues masculins. L'écrasante majorité d'entre elles mettent ici en cause le manque de modèles de réussite féminins pour les artistes indépendantes.
Les deux tiers des témoins interrogés citent le harcèlement et l'objectification comme le problème le plus important à résoudre dans les années à venir, suivi de près par les inégalités de rémunération. Parmi les domaines dont elles se sentent le plus souvent exclues, les créatrices citent la production et la composition, souvent considérés à tort comme plus « masculins » que les autres. Enfin, parmi les fléaux à combattre, elles sont 38 % à citer l'âgisme, cette tendance à discriminer selon l'âge, dans une industrie où les artistes semblent presque toutes disparaître de la scène passé 40 ans, et où, pour 83 % des créatrices interrogées, l'un des enjeux principaux pour les femmes reste l'apparence.
Quand le monde des musiques électroniques fait émerger des solutions
D'après cette étude internationale, les créatrices attendent des leaders de l'industrie musicale mais aussi des législateurs qu'ils mettent en place des politiques de diversité pour mettre fin à ces inégalités. Pour elles, le changement passera aussi par le dialogue, via la création d'espaces de travail « safe » et la mise à disposition de ressources pour mieux comprendre les ressorts de ces discriminations.
En France, la prise de conscience dans ces domaines est florissante, et les professionnelles de la musique sont les premières à passer à l'action avec la ferme intention de changer la donne. Le monde de la nuit est en pointe sur l'activisme féministe : les activistes de Consentis se battent pour lutter contre les violences sexuelles en milieu festif, les membres du Venus Club donnent de la force aux femmes DJs et productrices, et plus récemment, la nouvelle plateforme Connect'Her s'est donné pour mission de recenser et de mettre en lien les musiciennes électroniques de toute la France.
Retrouvez l'ensemble de l'enquête (en anglais uniquement) ici.
C. Laborie
31 mars 2021